Parcours en muscadet – épisode 14 : Thés de compost

Le 01/03/2021 à 9:39
En formation, Robin Euvrard a perfectionné sa connaissance des thés de compost oxygénés. (© R. Euvrard)

 

JOURNAL DE BORD D’UN VIGNERON BIO

Vitisbio suit un vigneron pendant une année. Chaque quinzaine, nous découvrons son actualité, ses enjeux techniques, ses difficultés et ses réussites !

 

Thés de compost

 

En cette fin d'hiver, Robin Euvrard en profite pour se former sur les thés de compost oxygénés. En parallèle, il poursuit la taille, et sélectionne des sarments chez d'autres vignerons pour de futurs complants.

 

Vous avez suivi une formation sur le thé de compost oxygéné ?

Oui, je poursuis ma démarche d’enrichir mes connaissances, de découvrir de nouvelles techniques et de nouvelles approches. Ce coup-ci, c’était une formation sur les thés de compost oxygénés (dits TCO), organisée en Anjou. C’est Jérémy Rizoud, l’un des spécialistes du sujet en France (il travaille avec Elaine Ingham, LA référence mondiale), qui était venu nous partager ses expériences le temps d’une journée. L’objectif est l’extraction et la multiplication des micro-organismes du compost en vue d’une application foliaire, pour stimuler le « vivant » de nos cultures et les renforcer dans leur croissance et leur protection. Un moyen d’imaginer diminuer les produits phytos pour certains. De mon côté, je m’attache surtout à cette technique comme un moyen supplémentaire d’accompagner la plante face aux aléas de production et climatiques. Les « recettes » varient d’un praticien à l’autre, la base étant d’associer le compost à une eau de qualité, avant l’ajout de produits complémentaires (acides humiques, fulviques, etc.). Mais plus que la technique en tant que telle, Jérémy insiste beaucoup sur la qualité de la matière première : le compost. C’est la base pour l’élaboration d’un produit performant sur nos cultures, et cela nécessite un suivi précis et rigoureux, que l’on envisage un compost dit « thermophile » (qui va monter en température) ou un vermicompost (ajout de vers de compost). C’est une pratique que j’avais déjà intégrée en 2020 et que je compte renouveler et perfectionner pour la campagne à venir. Une étape de plus dans l’ensemble des autres pratiques que j’envisage pour une approche de « régénération » de mes sols et de mes plantes.

Pour le vigneron, les thés de compost oxygénés s'inscrivent dans une démarche de régénération des sols et des plantes. (© R. Euvrard)

 

Quel est le programme en cette fin février sur le domaine ?

Dans le métier de vigneron, j’apprécie tout particulièrement la diversité des activités. Alterner des journées en extérieur et des journées à l’abri, au chaud. J’ai remis un pied dans le chai avec le transfert de mes quelques hectolitres de gamay dans un œuf en grès, pour finir l’élevage avant les mises en bouteilles du printemps. C’est presque étrange d’y retourner, de se remettre à laver des tuyaux, la pompe, tout le petit matériel nécessaire au bon déroulé du travail de cave. Me revient, de fait, une question que j’avais mise de côté : l’achat d’une pompe. Alain, un voisin vigneron pré-retraité m’a prêté une pompe classique à rotor pour les dernières vendanges. Mais j’aimerais un outil plus doux, plus adapté à mon objectif de faire un vin avec le minimum d’ajouts (dont sulfites). Mais c’est difficile de m’y retrouver entre les différents matériels, avec des prix très variables (quelques centaines d’euros jusqu’à plusieurs milliers).

 

Et le projet de complantation, où en est-il ?

J’ai profité du mois de février pour aller prélever des sarments chez d’autres vignerons. J’envisage cette année de mettre en place une petite pépinière privée pour produire mes propres complants. J’ai contacté quelques voisins qui m’avaient dit avoir des vieilles sélections massales de melon B, et dont une sélection a déjà été effectuée pour écarter les plants virosés ou suspects. J’aime l’idée d’intégrer un patrimoine d’autres lieux, d’autres histoires. Dans la parcelle de Jean-Baptiste, un jeune vigneron de Mouzillon, c’est ainsi son arrière-grand-mère qui avait participé à la plantation. J’achèterai en complément quelques fagots de porte-greffes chez un pépiniériste et me prendrai quelques jours, la taille terminée, pour greffer le tout avant leur plantation. Une affaire à suivre.

Robin Euvrard est allé prélever des sarments chez d'autres vignerons, pour ses futurs complants (© R. Euvrard)

 

La taille est-elle finie ?

Elle est désormais bien lancée, le dos courbé auprès des ceps. Le plaisir de l’activité de plein air, c’est de suivre le rythme de la météo en direct. Au début du mois est passé un bon coup de froid, comme partout ailleurs, avec gelées et un petit épisode neigeux. Pull, sous-pull, chaussettes en laine, l’équipement de montagne pour se garantir un minimum de confort. Pour ce coup-là, le petit feu dans la « brouette à sarments » a fait son effet. Et depuis quelques jours, il règne un grand soleil avec une remontée des températures, on taille avec à peine un pull sur les épaules. Drôle de saison. Mais qui fait déjà paraître une pointe d’inquiétude avec les deux hectares qu’il me reste à tailler. Si les températures hautes se maintiennent, le débourrement risque d’être précoce… et la période de risque pour le gel allongée… J’essaie de laisser ça de côté, mais un coin de ma tête ne peut s’empêcher d’y penser.

 

Propos de Robin Euvrard