Parcours en Beaujolais épisode 2 :
Gel et travaux aux parcelles : un début de printemps chargé

Le 26/04/2021 à 15:03

Olivier Renard, installé depuis 2017 dans le Beaujolais, n’a pas été épargné par le gel de ce printemps. Dans ce second épisode, il raconte comment cela s’est passé sur ses vignes de gamay. Sans oublier les travaux de printemps qui n’attendent pas !

Olivier Renard a brûlé des sarments un soir de gel. "Mais sans trop y croire !"

 

FACE AU GEL, UNE LUTTE IMPOSSIBLE...

Le gel a frappé fort sur le Beaujolais en ce début avril, entre -2 °C et -5 °C durant de longues heures : difficile pour la vigne de résister à ces assauts du froid quand les premières feuilles sont déjà déployées. Pour ma part, sur mes 6 parcelles réparties entre le piémont de la Côte du Py à 300 m et les hauteurs de Saint Joseph, à près de 600 m d’altitude, j’ai pu limiter la casse. Les premiers jours ont été plutôt en deçà de nos craintes, mais c’est la troisième nuit qui a été fatale : -4 °C au niveau des vignes, moins de vent, un petit épisode de neige sur les hauteurs...

Ce sont surtout les parcelles taillées le plus précocement, et parties plus tôt, qui ont souffert : mes deux parcelles de Morgon, sur le Climat des Charmes. Heureusement, le gamay a une forte capacité de reprise,   comparativement à d’autres cépages (le pinot noir par exemple), ce qui limitera peut-être les dégâts, si les froids restent modérés jusqu’aux saints de glace. Le chardonnay – pour ceux qui en ont – a souffert partout.   J’espère 80 % de rendement sur mes parcelles les plus préservées, 50 % sur les Charmes...

> À relire :  article Vitisbio « Précocité de la vigne et gel, le mauvais mariage. Retour sur le gel de 2020. »

ALORS QUE FAIRE DANS CES SITUATIONS DÉSESPÉRÉES ?

Les bougies à 6-7 000 € l’hectare par jour n’existent pas en Beaujolais, plutôt brûler la vigne directement... ! Certains ont tenté les rotations au canon (soufflerie) dès 4h00 du matin, à défaut d’hélicoptère... Le Beaujolais était bien enfumé également au matin du troisième jour. Pour ma part, j’ai opté pour une valériane préventive le second soir, déjà plus froid, mais a-t-elle eu le moindre effet ? Difficile à dire. Un collègue en biodynamie en a passé les trois soirs et en était plutôt content. Il serait intéressant de voir si le mode de culture a également joué ou non.

Ce que je crois. Les bio ont des sèves plus concentrées, non diluées par les apports chimiques, ce qui doit conférer une plus grande résistance au froid, mais combien de degrés gagnés ? Les sols enherbés ont peut-être aussi un rôle tampon, malgré le risque d’humidité accrue : c’est dans les déserts que les nuits sont les plus fraîches... La taille bien sûr joue un rôle aussi. La taille douce, par analyse approfondie des flux de sève, promue notamment par le formateur   Marceau Bourdarias   pourrait être une réponse, mais j’ai peur qu’elle soit extrêmement consommatrice de temps, pour un résultat aléatoire. Pour approfondir le sujet, voir ici l’excellente vidéo post-gel de Ver de terre production.

> Découvrir l’article de Biofil : « Gel du printemps 2017, essayer de limiter la casse »

Dynamisation de valériane à la parcelle en traitement post gel.

 

SE CENTRER SUR LA VIGNE

À l’avenir, je ne pense pas changer mes pratiques, ces épisodes – plus ou moins forts – font partie des risques habituels que nous avons à gérer, et je préfère investir dans la vie de la vigne (y compris en plantant des haies), plutôt que dans des équipements coûteux à l’efficacité discutable. Je changerai en revanche probablement ma planification de taille, en taillant plus tard les parcelles qui ont souffert cette année.

LE PRINTEMPS EST LÀ !

Il faudra en mai être attentif à l’équilibre des ceps, avec une éventuelle taille en vert, pour éviter les excès de végétation dus à une reprise anarchique des bourgeons. Et espérer que la grêle, passée deux fois depuis mon installation en 2017, et les fortes chaleurs ne viendront pas alourdir le tableau... En attendant, il faut finir les rebrochages dans les vignes. Cette année, j’ai 400 plants en sélection massale fournis par mon pépiniériste local. Je suis chanceux d’avoir eu mes plants, il y a pénurie en Beaujolais : la fin programmée du glyphosate commence à avoir des effets chez les vignerons conventionnels, qui anticipent la reprise du travail du sol et restructurent leurs vignes en masse...

LE TEMPS DE LA 500P

Côté biodynamie, je prépare cette semaine ma 500P, bouse de corne préparée à 100 g/ha. Un peu en retard car j’attendais un réchauffement des sols qui a tardé. Je la combine avec une décoction de prêle (anti-maladies cryptogamiques) et de consoude (recommandée en post-gel) et un peu de valériane (les écarts de température jour/nuit étant encore importants). Le pulvérisateur sera le standard italien, et pour la dynamisation j’en suis encore au tonneau et à la main :  j’ai du mal à envisager 4 000 € d’investissements dans un dynamiseur en cuivre ou en bois pour l’instant... Et la dynamisation à la main me semble plus « subtile ».

 

LE PARTAGE D'OLIVIER :

À l’initiative de l’ARDAB et de notre association de vignerons bio en Beaujolais Ceps & Charrues, nous avons réussi à constituer un groupe technique pour déposer un dossier DEPHY, sur le thème de la vie des sols et de la biodiversité des vignobles... Si le dossier est retenu, nous aurons donc un animateur sur le territoire pour nous aider – entre autres – à creuser ces sujets sur 5 ans et en diffuser les enseignements...