Parcours en Côtes du Rhône - épisode 3 :
Des vins prêts à s’élever

Le 14/10/2021 à 11:50

Tous les raisins rentrés, les vinifications se mettent en route, en suivant une organisation bien huilée au Mas de Libian. Et les macérations des blancs sont de plus en plus introduites dans les techniques de la famille Thibon.

Continuer d’expérimenter

Depuis quelques jours, nous avons soutiré, relogé, tous les vins. Voilà, nous rentrons dans une période de « somnolence » en cave bienvenue ! Je vous propose de faire un petit retour en arrière : depuis 2017, nous faisons des essais de macération sur les blancs. À Libian, nous sommes assez allergiques aux effets de mode et je dois bien vous avouer que même si nous adorons les blancs de macération italiens, nous étions assez opposés à pratiquer cette technique. Car, comme disait notre grand-père , «  être dans le vent, c’est un destin de feuille morte  »… Mais, en discutant avec Adriano Zago (conseiller en biodynamie en Italie), nous avons changé d’avis car il a eu une remarque très juste : «  Réfléchissez, chaque année il fait plus chaud, les maturités sont de plus en plus précoces, les raisins blancs mettent davantage d’énergie dans leurs peaux pour se protéger et vous, votre premier travail c’est de jeter cette énergie  ». Effectivement, ça mérite réflexion ! On va alors microvinifier différents cépages, mais en recherchant juste la macération, pas l’oxydation.

Une cave fonctionnelle au Mas de Libian.

Réorganisation de la cave

Ça, ce sont les grandes idées des débutants, car je ne sais pas vous, mais chez nous, les microvinifications ne sont jamais parfaites, donc de l’oxydation on en a eu, mais malgré cela, le chemin de réflexion se dessinait. Chaque année, on augmente la proportion de macération (40% en 2021) dans notre unique vin blanc, avec en priorité le roll, roussanne, et le soupçon de muscat. Pour faire simple, nous traitons ces raisins blancs comme nos rouges : éraflage, foulage, encuvage, vinification une dizaine de jours, remontage une fois par jour. Du coup, cela nous demande une réorganisation de la cave. En effet, nous avons la chance d’être sur trois niveaux et la cave de vinification des blancs était en bas… Impossible de réceptionner du raisin, uniquement du jus… Donc, petit ballet de cuve que l’on remonte avec le Fenwick : pour 2022, il va falloir que l’on reprenne l’organisation de la cave de vinification pour de bon !

Réception des raisins rouges au Mas de Libian.

Bien rodés pour la vinification des rouges !

Le programme : vendanges en petite benne, tri à la parcelle, réception sur table vibrante, puis éraflage ou pas, foulage ou pas, encuvage par gravité. À Libian, on n’a pas l’argent pour faire beau, du coup la cave n’est pas très jolie ni très chic mais elle est super pratique, fonctionnelle et ergonomique. La cave de vinification peut recevoir toute la vendange sans rotation de cuve : on peut TOUT vendanger sans s’arrêter et chez nous, ça peut aller vite les années précoces et chaudes avec environ 12 jours sans pause. Pour une réception par gravité, on déplace au-dessus des cuves, table vibrante, érafloir et fouloir qui sont sur roulettes. Et tout ce qui est lourd – robot pigeur, tapis roulant – se déplace sur rails.

Robot pigeur sur rails.

Ensemencer par pieds de cuve

Les vinifications sont toutes simples : éraflage 100 % sauf pour syrah que l’on vinifie selon la technique du mille-feuilles (1/5 vendanges entières). L’ensemencement est systématique dès la première benne, avec un pied de cuve pour les premiers raisins, puis de cuve en cuve.

Nous cherchons un départ en fermentation alcoolique (FA) franc et rapide, avec un remontage journalier et dégressif selon la densité. Souvent deux « grosses » aérations (vers 1060 et 1040) se réalisent dans la trémie du pressoir, les autres sont faites avec un baquet. Nous ne sulfitons pas lors des vinifications, en revanche nous pouvons utiliser du SO 2 après la fermentation malolactique (FML) selon la provenance et le type des raisins, ainsi qu’à la mise en bouteilles pour un total après mise inférieur à 30mg/L. 

En général, 7 à 8 aérations sont réalisées.

Nous dégustons tous les soirs (ça, c’est le meilleur moment du travail en cave) afin de décider s’il faut une aération supplémentaire ou pas, un pigeage – cette année nous en avons fait sur une seule cuve – ou si c’est le moment de décuver. Les temps de macération sont assez courts : plus ou moins six jours pour le vin de pétanque et une douzaine de jours pour les autres. L’écoulage se fait par gravité, les vins descendent encore d’un étage. Puis on attend la fin des sucres et ensuite… soutirages, mise en cuve, foudre, jarre, FML, mise au propre : l’hiver peut commencer.

Décuvage chez les Thibon.

Le partage d’Hélène : des analyses maison

L’analyse de fin des sucres est réalisée au domaine, via un produit acheté sur un site suisse, à base de comprimés à plonger dans le vin. De même, pour la FML, nous sommes équipés pour réaliser nous-même une chromatographie (via une pipette spéciale et un papier réactif). Le kit est acheté sur le site de la société Debize. Ces méthodes nous coûtent moins cher et grâce à elles, nous sommes super réactifs.

Les Thibon réalisent leur analyse de fin des sucres grâce à des comprimés à plonger dans le vin (à g.) et la fin de FML avec un kit de chromatographie (à d.).
Les Thibon réalisent leur analyse de fin des sucres grâce à des comprimés à plonger dans le vin (à g.) et la fin de FML avec un kit de chromatographie (à d.).

 

Hélène Thibon
(Crédit photo: Mas de Libian)